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le débutant

— Mais…

— Oh ! ne proteste pas. Je sais ce que tu vas me dire. Le rêve de toute femme intelligente et bonne, vois-tu, c’est d’être pour celui qu’elle aime, cette fée des contes, qui protège le beau chevalier, de sa puissance magique, et le fait triompher de tous les obstacles. Si je te donne ce qui me reste de jeunesse pour réaliser ce rêve, ce n’est pas moi qui serai volée.

Un coup de sonnette l’interrompit. Elle leva les yeux sur la pendule de la cheminée : il était plus de huit heures :

— C’est ma couturière, qui m’apporte une robe à essayer. Je n’y pensais plus.

Bien, je m’en vais.

— Impossible ! Tu ne peux sortir sans que cette femme te voie, et c’est une bien mauvaise langue. Puis, je désire que nous soupions ensemble, ce soir.

— Je ne demande pas mieux. Mais, que faut-il faire ?

— Viens, je vais te cacher dans ma chambre.

Cette chambre donnait sur le petit salon. Une tenture sombre en dissimulait l’entrée. Elle le fit pénétrer dans ce sanctuaire parfumé, lui recommanda d’être bien sage, de ne pas faire de bruit, puis, elle s’en alla recevoir sa couturière.

D’abord, le jeune homme ne distingua rien du tout dans la pièce, mais, peu à peu, ses yeux s’habituèrent à l’obscurité. Il s’aperçut qu’une fenêtre, au fond, projetait sur le tapis une vague lueur provenant de la rue voisine où brillait une grosse lampe électrique. Cette mystérieuse clarté lui fit entrevoir le lit où Simone devait dormir en rêvant de lui. Il s’en approcha avec respect, frôla la courtepointe. Sa main tremblait, un peu de fièvre égarait sa pensée, il voulut échapper à cette hantise et se retourna. Près d’une

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