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cilius par les bras le poussaient devant le tribunal. Rufus et ses assesseurs, visiblement irrités de cette obstination, se concertaient.

Le maître primaire qui se tenait toujours près de l’estrade du prétoire, à côté des scribes et des sténographes, ayant reconnu l’illustre élève des rhéteurs de Carthage, l’interpella quinteusement :

« Comment ! Toi, un savant, tu soutiens des illettrés !

– Il a l’esprit troublé ! dit Julius Martialis, en se penchant à l’oreille de Rufus. Depuis qu’il a perdu sa fille, il est devenu comme un insensé ! »

Et Roccius Félix, ravi d’humilier son ancien rival, ajouta :

« C’est une tête faible ! Il a toujours été incapable de remplir ses charges ! »

Cécilius haussa les épaules en dévisageant le vaniteux parvenu :

« Ne sois pas si fier, Roccius, de ta nouvelle dignité ! Tu manges les reliefs de mon festin ! »

Puis, montrant des accusés qu’on venait d’introduire, et qui, enchaînés, attendaient leur tour :

« Je suis avec ces hommes. Je suis l’un d’eux ! S’ils ont mérité le supplice, je l’ai mérité aussi… »

Alors Rufus, outré d’une telle audace, rejeta décidément son masque de prudence officielle :

« Tu le veux ! dit-il. Tu as réfléchi aux conséquences de ton acte ?

– Oui ! dit fermement Cécilius.

– C’est bien !… Conformément aux édits des sacrés Empereurs, je prononce contre toi la peine de la confiscation. Je te déclare déchu de tes titres et honneurs. Je te dégrade… Qu’on lui enlève le laticlave ! Licteurs, saisissez-le ! »

Des claquements de mains, des clameurs frénétiques accueillirent la sentence du préfet :

« Mort au sacrilège !