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II

LA VIGNE ET LA MAISON

A Lambèse, les choses allaient si mal pour les chrétiens que Cécilius, plutôt que de s’y arrêter, avait préféré rentrer en toute hâte à Muguas.

Des serviteurs, laissés à l’Auberge de l’aigle et chargés de ce soin, lui ramèneraient Birzil, au cas où l’option Victor réussirait à la tirer des griffes de Sidifann. Dans l’état de désarroi moral où il se trouvait, il ne se sentait pas assez maître de lui-même pour assister froidement aux atrocités qui se perpétraient par ordre des autorités impériales. En effet, les interrogatoires des inculpés de Cirta se poursuivaient quotidiennement dans la prison du prætorium. Les chevalets de torture ne chômaient plus. Sur le parvis du temple d’Esculape, la multitude ameutée avait brûlé vifs un homme et une femme de Verecunda qui, en sortant de la prison où ils étaient allés visiter des consanguins, s’étaient répandus en malédictions et en anathèmes contre les dieux de l’Empire. Continuellement des collisions se produisaient dans les rues. On assommait à coups de matraque les « athées », les « sacrilèges, ennemis des très saints Empereurs », comme on appelait les chrétiens. Si Cécilius intervenait en faveur des frères, c’était se trahir immédiatement ; c’était la confession publique imposée par sa conscience. Car il savait bien qu’il irait jusque-là, et plus loin encore, ne fût-ce que pour rester fidèle à son serment baptismal. Avait-il le droit de