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L’APPEL DU SOL

Vaissette revint à lui. L’avalanche grondait en ébranlant la terre et l’air. Mais le moment de l’attaque approchait. Chacun le sentait, en éprouvait l’horreur sacrée. L’oreille s’était si bien habituée au fracas des détonations qu’on pouvait s’entendre parler.

Le capitaine de Quéré cria :

— Il est onze heures trente. J’ai l’heure du commandant. Réglez vos montres sur la mienne. À midi, sans ordre nouveau, le déclenchement.

Il était d’un calme souverain.

Il étreignit les mains de Vaissette et de Fabre. Il souriait. Il leur dit :

— Mes amis, vive la France !

Il les quitta sur ces mots. Sa silhouette élancée se perdit dans le boyau.

Les chasseurs ne tenaient plus en place. Une agitation fébrile remplaçait leur acceptation stoïque, comme si un démon se fût emparé d’eux. Ils regardaient, par-dessus le parapet, le terrain d’attaque, où nos obus soulevaient encore des colonnes de terre et de fumée.

— Comme c’est petit, pensa Lucien, ce court espace à franchir !