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L’ENNUI DANS LA TRANCHÉE

On ne pouvait le ravitailler qu’à la nuit. Sans arrêt, ses chasseurs allongeaient l’excavation. Enfin, on put construire un boyau perpendiculaire qui la reliait aux autres tranchées. La nuit suivante fut consacrée à l’organisation du parapet et des abatis, puis, en avant, du réseau. Les sentinelles allemandes étaient à quelques mètres. Servajac, Angielli, le sergent Batisti et l’officier tapaient sur les piquets pour les ficher au sol. On les avait entourés, afin d’amortir les coups, de lambeaux de drap découpés dans les pèlerines et les vareuses des morts. Entre les piquets, on tendait le fil de fer. Et les chasseurs, que l’angoisse n’avait pas quittés dans cet ouvrage, tels des marins trop exposés sur la proue aux fureurs des lames, sentaient l’assurance leur revenir à mesure que le réseau étendait sa trahison tutélaire.

La vie reprit alors son cours monotone dans la nouvelle tranchée. On l’améliora. Puis on en creusa une seconde, à quelques mètres en arrière, où chacun eut son coin, son abri, sa maison. On donna des noms aux boyaux de plus en plus nombreux : il y eut le boyau de