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diable ». Le mot est très juste ; d’Alembert a des colères et des mots piquants, il dit sur tous toute la vérité, mais n’en veut à personne.

Le vaniteux Fontaine, quoi qu’en ait dit Diderot, n’était ni estimé ni aimé de d’Alembert. Il en parle souvent avec dédain, et quand il annonce sa mort à Lagrange, c’est avec plus que de l’indifférence. « Monsieur Fontaine est mort dans un état fort misérable, accablé de dettes et même ruiné ; le tout par sa faute et pour avoir eu la vanité de vouloir être seigneur de paroisse et d’avoir acheté pour cela une terre qu’on lui a vendue un prix fou et qu’il n’a pas pu payer.

« C’était un homme de génie, mais d’ailleurs un fort vilain homme. La société gagne à sa mort encore plus que la géométrie n’y perd. » Fontaine n’était pas un homme de génie, d’Alembert le savait bien, mais il fallait aiguiser la pointe de l’épigramme.

Lagrange répond :

« J’ai été fort touché de la mort de M. Fontaine et surtout des circonstances qui l’ont accompagnée, quoiqu’il se fût déchaîné contre moi sans rime ni raison. Le souvenir de ses anciennes bontés pour moi m’empêchait cependant de lui vouloir du mal. »

Les traits lancés par d’Alembert contre ses confrères sont continuels. Lorsque Lagrange est nommé associé étranger de l’Académie des sciences, une voix manque à l’unanimité. C’est celle d’un médecin nommé Hérissent, « très plat sujet et bien méchant bougre ».