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Le dévouement de d’Alembert pour ceux qu’il aimait était sans limite et toujours prêt, mais il aimait peu de monde. Jovial et familier avec les indifférents, il avait le don de leur plaire, les traitait en amis sans s’engager à rien, et sa verve satirique, qui souvent dépassait sa pensée, prenait en s’exerçant sur eux l’apparence d’une trahison.

Il se plaisait peu parmi ses confrères de l’Académie des sciences et, sans vouloir s’en faire des ennemis, parlait souvent d’eux comme s’ils l’avaient été.

Sa correspondance avec Lagrange est toute scientifique ; l’Académie des sciences y semble occuper le centre de ses pensées et de sa vie. Dans la liberté d’un commerce intime, il dit sans y attacher d’importance ce qu’il pense de chacun. Le secrétaire perpétuel, Grandjean de Fouchy, dont il destine la succession à son ami Condorcet, est négligent et inepte. L’épithète de Viédaze semble faite pour lui comme celle de : aux pieds légers, pour Achille. Quand le nom de Lalande se rencontre sous sa plume, une épithète injurieuse le précède ou le suit. Les éditeurs de la correspondance ont remplacé l’une d’elles par des points ; nous imiterons leur réserve. Lagrange, en apprenant par un tiers la réconciliation de d’Alembert avec celui qu’il traitait si mal, marque un étonnement bien naturel. D’Alembert lui répond : « À propos de Lalande, il est vrai que nous sommes raccommodés parce qu’il en a témoigné un grand désir et qu’au fond je suis bon