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naître même ; il ne cherchait pas à l’apprendre, ayant compris, dès le premier jour, qu’il serait à mauvaise école.

D’Alembert cependant veille sur lui, jamais il ne dépasse les bornes et rassure sur ce point Mlle de Lespinasse, à laquelle il rend compte de tout.

« Ne vous flattez pas, ajouta-t-il, que j’en sois ni moins polisson à mon retour, ni de meilleure contenance à table. Il est vrai que je ne polissonne pas ici, mais, par cette raison même, j’aurai grand besoin de me dédommager, et, à l’égard du maintien de la table, c’est la chose du monde dont le roi est le moins occupé et je ne saurais m’instruire avec lui sur ce grand sujet. »

Frédéric désirait vivement garder d’Alembert ; il lui proposait avec une affectueuse et discrète insistance la présidence de son Académie.

« Je ne vous répéterai pas, pour ne pas vous ennuyer, écrit d’Alembert à son amie, à quel point le roi est aimable et toutes les bontés dont il me comble. Hier, après son concert, je me promenai avec lui dans son jardin ; il cueillit une rose et me la présenta en ajoutant qu’il voudrait bien me donner mieux. Vous sentez ce que cela signifie, et ce n’est pas la première fois qu’il m’a parlé sur ce ton-là.

« Il me dit hier qu’il fallait que je visse l’Académie et tout ce qui lui appartient pour en juger par moi-même.

« Je crus entendre ce que cela voulait dire et je lui dis que c’était bien aussi mon projet, mais que, mon