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l’habitude de la démonstration, en nous faisant reconnaître et saisir l’évidence dans tout ce qui en est susceptible, nous apprend encore à ne point appeler démonstration ce qui ne l’est pas et à discerner les limites qui, dans ce cercle étroit des connaissances humaines, séparent la lumière du crépuscule et le crépuscule des ténèbres. »

L’intention est évidente, mais pour la rendre claire, et c’est tout ce que voulait d’Alembert, il aurait suffi de trois lignes.

D’Alembert, pour rire et pour faire rire, dépassait quelquefois les limites du bon goût. Il est impossible de l’approuver lorsque, faisant l’éloge de M. de Clermont-Tonnerre, évêque de Noyon, dont Boileau disait : « Il m’estimerait bien davantage, s’il savait que je suis gentilhomme », il changeait le titre habituel de sa lecture en celui de panégyrique, par la raison que ce prélat, célèbre par ses ridicules, ne saurait être loué dans le style habituel ; il était nécessaire de combattre les exagérations, de démentir les légendes qui ont réuni dans l’histoire de son héros tous les traits ridicules de la vanité, comme dans celle d’Hercule tous les prodiges de la force.

D’Alembert est souvent ingénieux, rarement léger. Voulant louer Segrais qui n’a pas accepté l’honneur qu’on voulait lui faire d’avoir composé sous le nom de Mme de Lafayette son petit chef-d’œuvre : la Princesse de Clèves, il dit : « Segrais n’a jamais hésité à le rendre à son véritable auteur et l’a toujours rendu avec la sincérité la plus franche, sans emprun-