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— 935 — AVOCAT comme complice. L'avocat, n'est pas responsable dos con- seils qu'il donne. Comme il n'est pas mandataire, ce qu'il dit n'oblige pas le client; mais si l'avoué est présent et garde le silence, il accepte les paroles de l'avocat et les tait siennes. L'avocat jouit, pour la défense des droits de son client, d'une liberté absolue. Aussi ne saurait-il être poursuivi pour diffamation ou injure à raison de ses plai- doiries ou de ses consultations. Il a droit à l'audience au respect des magistrats et à celui des plaideurs; mais il est douteux qu'il puisse invoquer le bénéfice de l'art. 224 du c. pén., car cette disposition prévoit seulement l'outrage commis contre un officier ministériel dans l'exercice de ses fonctions et l'avocat n'a pas cette qualité. Lorsque les juges ne sont pas en nombre ou encore en cas de partage, les avocats peuvent être appelés au tribunal pour remplir, par intérim, les fonctions de juge. Ils occupent également, en cas de nécessité, le siège du ministère public. Mais on discute très vivement sur le point de savoir si, avant de monter au tribunal, l'avocat ne doit pas prêter le serment imposé aux magistrats. La jurisprudence se prononce, et avec raison, dans le sens de la négative ; la qualité même de l'avocat le rend apte à tous les devoirs de sa profes- sion, notamment à celui de siéger au tribunal dans les cas prévus par la loi. Les avocats de chaque tribunal ou de chaque cour sont représentés par un conseil de discipline dit conseil de l'ordre. Les membres de ce conseil sont élus en assemblée générale par scrutin de liste, à la majorité absolue des avocats présents. Les avocats inscrits au tableau prennent seuls part aux élections, à l'exclusion des stagiaires. Les bulletins blancs ne comptent pas, car ils ne représentent pas des suffrages exprimés. En cas de partage, un usage constant donne la préférence au plus ancien suivant l'ordre du tableau. Le nombre des membres du conseil de l'ordre varie d'après celui des avocats du tribunal ou de la cour : cinq, si l'ordre comprend moins de trente avocats ; sept, s'il y a de trente à cinquante avocats ; neuf, si les avocats sont entre cinquante et cent; quinze, au-dessus de cent. A Paris, par exception, le conseil de discipline compte vingt membres, non compris le bâtonnier. L'éligibilité est res- treinte aux anciens de l'ordre ; à Paris il faut être avocat depuis plus de dix ans pour avoir cette qualité; mais en province on l'obtient après cinq années d'exercice. Lors- qu'il n'y a pas plus de cinq avocats, ceux-ci ne nomment qu'un bâtonnier et le pouvoir disciplinaire est exercé par le tribunal. Encore faut-il qu'ils soient au moins trois; autrementle tribunal remplirait les fonctions de bâtonnier. L'ordonnance de 1830 voulait que le bâtonnier fût élu par l'assemblée générale des avocats et ce système fut observé jusqu'en 1852. A cette dernière époque, l'élection du bâton- nier fut réservée au conseil de l'ordre, mais un décret du 10 mars 1870 a rendu l'élection du bâtonnier à l'assem- blée générale des avocats. Le conseil de l'ordre statue sur les demandes d'admission au stage ou au tableau, sauf appel à la cour, comme on l'a vu plus haut ; il surveille les stagiaires. Enfin il exerce un pouvoir disciplinaire, lequel ne se restreint même pas aux infractions commises par les avocats dans l'exercice de leur profession, mais s'applique aussi aux faits de la vie privée, si leur notoriété peut nuire à la considération dont doit jouir tout avocat. Les décisions du conseil de l'ordre sont prises à la majorité absolue des membres présents et ceux-ci doivent à leur tour représenter au moins la moitié plus un des membres du conseil. Le pouvoir disciplinaire est exercé soit d'office, soit sur la plainte des particuliers ou du ministère public. Mais lorsqu'une poursuite judiciaire est commencée contre un avocat, le conseil attend toujours que la justice ait statué avant de s'emparer de l'affaire au point de vue dis- ciplinaire, pour ne pas inlluencer la décision des magistrats. Aucune peine disciplinaire ne peut être prononcée sans que l'avocat ait été entendu ou tout au moins appelé avec délai de huitaine pour comparaître. Les peines que peut infliger le conseil consistent dans l'avertissement, la répri- mande avec censure, la suspension qui ne saurait excéder un an, la radiation qui prive du droit d'exercer la profes- sion auprès du tribunal ou de la cour. Depuis le décret de 1852, il existe une cinquième peine, l'interdiction pendant dix ans au plus de faire partie du conseil. C'est seulement en cas de suspension ou de radiation que l'avocat peut interjeter appel devant la cour; le procureur général, au contraire, peut appeler de toute décision disciplinaire devant la cour du ressort. Cette cour statue en assemblée générale dans la chambre du conseil. Lorsque l'avocat a tait défaut il a, dans tous les cas, la voie de l'opposition et l'affaire revient sur cette opposition devant le conseil de l'ordre. Les décisions du conseil en dernier ressort et celles de la cour ne peuvent être attaquées par le pourvoi en cassation que pour cause d'incompétence et d'excès de pouvoir. Les tribunaux, de leur côté, exercent sur les avocats un pouvoir disciplinaire pour les faits commis à leur audience ; ils peuvent prononcer l'avertissement, la réprimande, la suspension et la radiation. Leurs jugements sont susceptibles des mêmes voies de recours que les déci- sions disciplinaires du conseil : opposition s'ils sont ren- dus par défaut; appel, s'ils prononcent la suspension ou la radiation. Les décisions disciplinaires des cours d'appel et des cours d'assises ne sont susceptibles que d'opposition si elles sont par défaut et de pourvoi en cassation. 11 faut bien remarquer que la peine de la suspension et celle de la radiation produisent des effets purement relatifs : l'avo- cat ne peut plus exercer sa profession pour un temps ou à perpétuité devant le tribunal (ou la cour) auquel il était attaché; mais rien ne s'oppose à ce qu'il demande son inscription auprès d'un autre tribunal, auprès d'une autre cour. Il faut en dire autant du cas de refus d'inscription d'un licencié au stage ou d'un stagiaire au tableau : ce pos- tulant, repoussé par un conseil de l'ordre, peut se faire inscrire dans une autre ville. Il nous faut en terminant dire deux mots des avocats à la cour de cassation et au conseil d'Etat. Dans notre ancienne France, les plaideurs étaient représentés au Con- seil des parties par des avocats spéciaux appelés avocats au conseil, véritables officiers ministériels. Leurs charges furent supprimées avec le Conseil du roi (loi 1417, avr. 1791). Mais la loi du 27 ventôse an VIII (art. 93) a réta- bli ces avocats en leur donnant toutefois le nom d'avoué. Le titre d'avocat leur a ensuite été rendu par décret du 25 juin 1806. Un autre décret du même mois, du 11 juin 1806, a créé des avocats auprès du conseil d'Etat; ces fonctions d'avocat à la cour de cassation et au conseil d'Etat restèrent distinctes les unes des autres pendant tout le premier empire. L'ordonnance du 29 juin 1814, en fixant à soixante le nombre des avocats au conseil d'Etat, lés choisit presque tous parmi les avocats à la cour de cassation. Enfin l'ordonnance du 10 sept. 1817 a définitivement réuni les deux ordres sous la dénomination d'ordre des avocats aux conseils du roi et à la cour de cassation. Le nombre de ces avocats est resté fixé à soixante et c'est encore aujour- d'hui cette ordonnance du 10 sept. 1817 qui réglemente cette corporation. En réalité, ces avocats sont à la fois avocats et avoués : ils représentent les parties, font les actes de la procédure et plaident; ils sont officiers minis- tériels, propriétaires de leurs charges, et exercent le droit de présentation (V. Officiers ministériels). Avant d'entrer en fonctions, ils versent un cautionnement qui garantit leurs faits de charge, c.-à-d. les fautes qu'ils pourraient commettre dans l'exercice de leurs fonctions, et ils prêtent un serment professionnel. Pour pouvoir être appelé à cette profession d'avocat à la cour de cassation et au conseil d'Etat, il faut être Français, avoit atteint l'âge de vingt- cinq ans, avoir été avocat près d'une cour ou d'un tribu- nal pendant trois ans au moins. N'oublions pas que, le nombre des avocats à la cour de cassation étant limité, il est nécessaire aussi qu'une charge soit vacante par décès ou par démission, et que dans ce dernier cas on soit présenté par le titulaire qui veut céder sa charge. En cas do décès