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l’entends, ma Lucile bien aimée ? Mon langage est presque celui d’un enfant, mais il est grave et mystérieux comme le vrai bonheur. Comme elle est forte, comme elle est suave, la flamme de notre foyer ! N’en sois pas jalouse, elle se réjouit de notre amour. Écoute-la bien, c’est de nos âmes qu’elle tressaille. Plus je l’entends, plus j’écoute l’harmonie de ton âme. Et ton âme, n’est-ce pas la mienne ? Sans la lumière si douce reçue de la tienne, qu’est-ce que la mienne serait devenue ? Quand je contemple ainsi la flamme, ne sois pas jalouse, ma Lucile bénie, j’y vois tes grands yeux noirs s’éclairer ou s’approfondir… Je songe à leur franchise, à leur ardeur si bonne… N’est-ce pas ton âme qui m’a rendu brave et content de vivre ? Comme je t’aime ! Comme je suis heureux ! Sans toi, je n’aurais jamais eu le courage d’aimer le peuple. Si je me dévoue, si je suis fort et si j’ai pitié, si je réchauffe des cœurs et ranime des volontés, si j’ajoute à ma race de la vie et de l’amour, si je sens croître en moi le désir et la puissance d’être utile, je le dois à la tendresse qui brûle au fond de tes beaux yeux noirs… Ne sois pas jalouse de la flamme, elle s’émeut de nos âmes, elle chante l’amour, le nôtre, celui de la race, de la patrie…

Lucile, à travers un sanglot, balbutie :