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tives et les arrêts. Tant de choses lourdes se pressent qu’il ignore de laquelle il se déchargera la première. Oh ! qu’il voudrait, d’une seule explosion, faire éclater son dédain et son indignation ! L’appel du jeune homme à l’indulgence, à la largeur d’esprit, ses paroles à la fois énergiques et tendres tombèrent comme sur du granit : elles retardèrent un peu la fureur de Gaspard contre son fils…

Jean, que cette exclamation cinglante a pétrifié d’abord, qu’une anxiété plus brutale a ressaisi, dont une vague de défaillance a submergé l’âme, est redevenu certain de lui-même, de la bravoure à l’avance résolue. La conviction impérieuse qu’il gagnerait l’assentiment du père à son amour le possède : il se sent l’intelligence ferme et nette, le cœur inépuisable de constance à vouloir, à se défendre, à conquérir. N’a-t-il pas de l’ascendant, du magnétisme, grâce à l’instruction que l’autre vénère, à l’affection plus vivace entre eux qu’ils ne se le témoignent ? Oh ! comment choisir la formule qui sans délai va s’attaquer à l’objection formidable ? Il la pressent, mais il ignore de quelle façon, avec quelle virulence le père la médite, avec quelle rancune il la réfrène péniblement. Jean songe à la lui faire diviser pour en combattre, en affaiblir chacune des parties.