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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

vaux, peu à peu conquérir une clientèle ? Il envie ses confrères qui auront à mener gaillardement la bataille du pain. L’oreille au guet, le cœur frémissant, ils attendront qu’un passant, hypnotisé par l’enseigne longtemps méconnue peut-être, leur apporte la première responsabilité, le premier sou du courage. Dès lors, en avant, la trouée commence ! Oh ! la griserie des tâches professionnelles, des joies qu’on sème, de l’aisance qui sourit, de la renommée qui accourt ! Mais Gaspard Fontaine, le père, est si riche que son fils, prisonnier des douces habitudes, n’en peut secouer la chaîne autour de son âme. Par des fibres sourdes, Jean est attaché à des choses multiples, à des raffinements que beaucoup d’argent seul prodigue. Ce désir de la lutte pour vivre n’est pas sincère, il n’est que la haine de l’oisiveté !

Souvent, la pensée d’aller, au foyer des pauvres, répandre le sourire là où il y avait des larmes, s’était introduite en l’esprit du jeune québécois. Ramenée par le mystère qui l’une à l’autre joint les idées, elle est plus lucide, elle commande, elle émeut. Pendant quelques minutes, une générosité ardente, mais dont il n’a pas l’héroïsme, le pousse vers le peuple. Quel verdict prononcerait la société québécoise dont l’opinion le faisait esclave ? On raillerait ce