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SOUS LE SOLEIL DE SATAN

vie future… une autre image… probablement… que le commun de nos fidèles… mais je ne puis croire que… votre haute intelligence… accepte sans révolte… l’idée d’une déchéance absolue, irrémédiable, d’une dissipation dans le néant ?

Les derniers mots s’étranglent dans sa gorge, tandis qu’il implore des yeux, avec une émouvante confusion, l’indulgence, la pitié du grand homme.

La férocité du mépris que Saint-Marin témoigne aux sots étonne d’abord, car il affecte volontiers par ailleurs un scepticisme complaisant. Mais c’est ainsi qu’il peut manifester au dehors, avec un moindre risque, sa haine naturelle des infirmes et des faibles.

— Je vous remercie, dit-il au curé de Luzarnes, de me réserver un autre paradis que celui de votre vicaire et de vos chantres. Les dieux me préservent cependant d’aller chercher là-haut une nouvelle Académie, quand la seule française m’ennuie assez !

— Si j’entends bien votre raillerie, répond le futur chanoine, vous m’accusez…

— Je ne vous accuse pas, s’écrie Saint-Marin tout à coup, avec une extraordinaire violence. Sachez seulement que je craindrais moins