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SYMPHONIES DE H. REBER
STEPHEN HELLER


En ce temps d’opéras-comiques, d’opérettes, d’opéras de salon, d’opéras en plein air, de musique qui va sur l’eau, d’œuvres utiles enfin destinées à soulager de leur labeur quotidien les gens fatigués de gagner de l’argent, c’est une singulière idée, n’est-ce pas, que de s’occuper d’un compositeur de symphonies ? Mais la fantaisie qu’il a eue, lui, ce compositeur, d’écrire des symphonies, est bien plus singulière encore ; car où des travaux de ce genre peuvent-ils, chez nous, conduire un musicien ? J’ai peur de le savoir. Voici en général ce qui arrive à l’artiste qui a le malheur de succomber à la tentation de produire des œuvres de cette nature. S’il a des idées (et il en faut absolument pour écrire de la musique pure, sans paroles pour suggérer des semblants de phrases, des lieux communs mélodiques, sans aucun accessoire pour amuser les yeux de l’auditeur) ; donc, s’il a des idées, il doit passer un long temps à les trier, à les mettre en ordre, à bien examiner leur valeur ; puis il fait un choix, et il développe avec tout son art celles qui lui ont paru les plus saillantes, les plus dignes de figurer dans son tableau musical.

Le voilà à l’œuvre, le voilà acharné à tisser sa trame musicale ; son imagination s’allume, son cœur se gonfle ; il tombe en des distractions étranges : quand il a travaillé toute la journée