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traînement passionné ne permet pas une telle largeur dans le débit. Ainsi les vers :


Parle, quel est celui dont la pitié cruelle
L’entraîne à s’immoler pour moi ?


doivent absolument être jetés avec une sorte de précipitation anxieuse. Nourrit père, qui, à mon sens, ne valait pas Michot, produisait dans ce rôle de grands effets précisément par cette rapidité de débit. Les artistes, en général, répondent, quand on la leur demande : « Il est très-difficile, en chantant si vite, de trouver le moyen de poser la voix. » Sans doute c’est difficile, mais l’art consiste à vaincre les difficultés ; s’il en était autrement, à quoi serviraient les études ? Le premier venu, doué d’une voix quelconque, serait un chanteur.

Ce n’est pour Michot qu’un léger effort à faire ; quand il voudra l’animer davantage, il doublera l’effet de ce rôle d’Admète qui lui fait le plus grand honneur.

La splendide voix de Cazaux ne pouvait manquer de faire merveilles dans le rôle du grand prêtre ; aussi Cazaux a-t-il été couvert d’applaudissements pendant et après sa scène :


Apollon est sensible à nos gémissements,


et au passage :


Perce d’un rayon éclatant
Le voile affreux qui l’environne.


Il a été tout à fait à la hauteur de l’inspiration de Gluck quand il a dit avec sa voix tonnante :


Le marbre est animé,
Le saint trépied s’agite.


Je ne crois pas pouvoir lui adresser un plus flatteur éloge.

Je l’engage à travailler son d’en haut, qu’il attaque toujours un peu bas.

Borchardt, qui débutait dans le petit rôle d’Hercule, a reçu un accueil qui doit l’encourager. Sa stature, sa voix robuste, le caractère de sa tête, conviennent parfaitement au personnage.