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fide Lycomède lève l’ancre, et, aidé par sa sœur Thétis qui lui envoie des vents favorables, il conduit Alceste à Scyros. Le rapt est consommé. Les deux rivaux de Lycomède se mettent aussitôt à la poursuite du ravisseur. Hercule et Admète arrivent à Scyros, assiégent la ville, en enfoncent les portes, mettent tout à feu et à sang en chantant :

Donnons, donnons, donnons de toutes parts.
Que chacun à l’envi combatte,
xxxxxxQue l’on abatte
xxxLes tours et les remparts.

Alceste est reprise, et probablement Lycomède est tué, car on n’entend plus parler de lui. Mais, dans le combat, Admète est grièvement blessé, il va mourir si quelqu’un ne meurt volontairement à sa place. Le théâtre représente un grand monument élevé par les arts. Un autel vide paraît au milieu pour servir à porter l’image de la personne qui s’immolera pour Admète. Cette personne ne se présente pas ; alors Alceste se dévoue. L’autel s’ouvre et l’on voit sortir l’image d’Alceste qui se perce le sein. La voilà descendue aux sombres bords. Désolation générale. Hercule, qui allait partir pour vaincre un tyran quelconque, se ravise alors et tient à Admète cet étrange langage :

J’aime Alceste ; il est temps de ne m’en plus défendre ;
Elle meurt ; ton amour n’a plus rien à prétendre.
Admète, cède-moi la beauté que tu perds ;
Au palais de Pluton j’entreprends de descendre :
xxxJ’irai jusqu’au fond des enfers
xxxForcer la mort à me la rendre.

Admète consent à cette étrange transaction et répond à Hercule :

Qu’elle vive pour vous avec tous ses appas,
Admète est trop heureux pourvu qu’Alceste vive.

Le grand Alcide arrive au bord du Styx. Il y trouve Caron repoussant à grand coups d’aviron les misérables ombres qui n’ont pas de quoi payer leur passage.