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l’explication d’un trait amusant dans ce trait lui-même, isolé de ce qu’il nous suggère. Nulle part ne se trahit mieux l’insuffisance de la méthode courante. Mais la vérité est que si on laisse de côté quelques cas très spéciaux sur lesquels nous reviendrons plus loin, la répétition d’un mot n’est pas risible par elle-même. Elle ne nous fait rire que parce qu’elle symbolise un certain jeu particulier d’éléments moraux, symbole lui-même d’un jeu tout matériel. C’est le jeu du chat qui s’amuse avec la souris, le jeu de l’enfant qui pousse et repousse le diable au fond de sa boîte, — mais raffiné, spiritualisé, transporté dans la sphère des sentiments et des idées. Énonçons la loi qui définit, selon nous, les principaux effets comiques de répétition de mots au théâtre : Dans une répétition comique de mots il y a généralement deux termes en présence, un sentiment comprimé qui se détend comme un ressort, et une idée qui s’amuse à comprimer de nouveau le sentiment.

Quand Dorine raconte à Orgon la maladie de sa femme, et que celui-ci l’interrompt sans cesse pour s’enquérir de la santé de Tartuffe, la question qui re-