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BIOGRAPHIE.

déjà comme l’un des prosélytes les plus fanatiques de l’école nouvelle. Au reste la famille Gautier, qui était venue s’installer à la place Royale, dans une maison contiguë à celle qu’allait bientôt occuper Victor Hugo lui-même, était conquise tout entière à la révolution littéraire, et Pierre Gautier en tenait pour la préface de Cromwell. Gérard commença donc par mener Théophile chez Victor Hugo. La présentation eut lieu rue Jean-Goujon où le poëte des Orientales demeurait alors. L’histoire de cette présentation est fameuse ; elle fut aussi décisive, car c’est à elle que nous devons Théophile Gautier. En présence de Victor Hugo, alors dans tout le rayonnement de sa gloire européenne, le jeune adepte (il n’avait encore que dix-neuf ans) fut saisi d’une émotion si flatteuse et d’un tremblement tellement explicite, que le maître en fut touché et qu’il en conçut pour son disciple une affection qui ne s’est pas démentie. Il l’engagea à publier le recueil des poésies qu’il avait en portefeuille et dont Gérard lui avait dit le plus grand bien, et il l’invita à venir le voir. C’est de ce jour que Théophile renonça à la peinture.

À quelque temps de là, Gérard lui apporta de la part de Victor Hugo son service de six places pour la première d’Hernani ; les coupons étaient timbrés, comme on sait, de la devise : « hierro ! » qui veut dire fer en espagnol. La première d’Hernani