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THÉOPHILE GAUTIER.

le fascino à son ami. Ce corbeau-là, il assurait en avoir ouï le croassement rue de la Vieille-Lanterne et l’avoir reconnu ! Terrible crédulité, contre laquelle il n’y avait pas à lutter, et qui contribua trop, pendant les derniers jours, à assombrir cette âme frappée, et visitée des fantômes de la mort. Quand, pour le rasséréner, on se risquait à parler librement de ces choses et à opposer des contre-preuves à ses exemples, le maître se contentait de vous regarder avec dédain, sans répondre, ou il vous traitait d’imbécile ou de fils de Voltaire, ce qui pour lui était absolument synonyme. Je dois ajouter, malgré mon scepticisme absolu à l’égard de ces préjugés, que pendant la dernière année de la vie du poëte, le jardin de sa petite maison fut hanté par une chouette, ce qui jusque-là était resté sans exemple, et que, la nuit, nous fûmes souvent réveillés par les croassements de cet oiseau de malheur, lequel, hélas ! n’avait plus rien à nous présager. Je ne crois pas qu’il l’ait entendue, à cause de sa dureté d’oreille toujours croissante, mais je l’aurais volontiers étranglée, elle et ses petits, pour l’angoisse qu’elle me causait, la malheureuse.

Plusieurs personnes m’ont demandé si Théophile Gautier, qui a écrit Spirite, croyait au spiritisme. Le maître s’amusait beaucoup de cette question, souvent adressée par moi aussi ; il aimait à racon-