DEUXIÈME ENTRETIEN
Ce qui faisait d’une conversation avec Théophile Gautier un rare plaisir de raffiné littéraire, un régal de dilettante, ce n’était pas seulement l’intérêt que le poëte y apportait de ses connaissances encyclopédiques, ou l’originalité, irreposée et féconde, de son génie propre, ouvert à mille visions, prompt aux perceptions instantanées, imprévues, enclin aux paradoxes magnifiques, audacieux et trouveur ; ce n’était pas même l’abondance de son éloquence infaillible, reine des images et dompteuse du verbe, — c’était sa voix.
À l’heure où j’écris ces lignes, il me semble l’entendre encore, cette voix enchanteresse, dont le timbre familier m’a ouvert tant de paradis ; c’est par elle que me sont venus les plus doux oracles de ma destinée ; par elle, les plus saintes initiations à ce grand culte, qui n’a point d’athées, l’Art. Tout ce que j’aime m’a été donné par un oui de cette voix-là. C’est sur le ton de cette voix que