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faite. — Quoique tu brilles dans tous les combats je crois qu’un sort plus terrible t’est réservé si tu oses passer une nuit auprès de Grendel. »

Beowulf, fils d’Ecgtheow, répondit :

« Combien de paroles tu as dites, excité par la bière, sur Breca et son voyage, mon ami Hunferth ! Je te dis en vérité que j’avais plus de force pour résister à la mer qu’aucun autre homme. Nous fîmes la promesse, quand nous étions encore jeunes, de risquer notre vie à la mer et nous tînmes notre parole6. Nous avions une épée nue dans la main qui devait nous protéger contre les baleines pendant que nous nagerions sur les flots. Il ne put avancer plus rapidement que moi, et moi je ne voulus pas le quitter. Nous fûmes donc ensemble sur la mer pendant cinq nuits ; puis les flots tumultueux, le temps glacial, la nuit obscure et le terrible vent du nord nous séparèrent7. Les poissons marins étaient irrités. Ma cotte de mailles me protégea contre les ennemis : ce vêtement de guerre couvrait ma poitrine. L’ennemi m’entraîna au fond ; il me tint sous sa griffe, mais je parvins à le frapper avec la pointe de mon épée : le monstre de mer périt par ma main dans le combat. »

X

« C’est ainsi que, souvent, les ennemis mirent ma vie en péril. Je les traitai avec ma chère épée comme il était juste ; ils n’eurent pas lieu de se réjouir de l’abondance du festin ni de m’avoir entraîné près du fond de la mer pour me dévorer, car le matin ils étaient étendus sans vie sur le rivage et désormais ils ne barrèrent plus la route à ceux qui naviguent sur la mer. La lumière se fit dans l’est, le brillant flambeau de Dieu parut ; les flots s’apaisèrent et je pus voir les promontoires marins et les côtes venteuses. Souvent le sort conserve la vie du brave ! Il me permit même de tuer avec mon épée neuf niceras. Je n’ai pas connaissance qu’on ait combattu plus rude combat la nuit sous la voûte