Page:Beowulf, trad. Botkine.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.

obscurs qui rendent la lecture du texte de Beowulf difficile.

« Alors que la même idée est multipliée par la périphrase, dit fort bien Sharon Turner[1] le reste de la sentence ne gagne pas en signification. Un mot ou une épithète est l’objet d’une répétition d’expressions synonymes, mais le sens de la phrase ne subit pas, par ce fait, d’amplification. »

L’historien cite comme exemple les vingt-huit termes dont Caedmon se sert dans sa paraphrase biblique pour désigner l’arche de Noé, circonstance qui ne paraîtra pas surprenante aux personnes à qui la poésie anglo-saxonne est familière. Dans une dissertation des plus intéressantes, mais qui est trop longue pour être reproduite ici en entier, il parle ensuite en ces termes de l’origine de cette poésie :

« L’origine de la périphrase s’explique aisément. Un chef ou un héros favori remportait une victoire et était reçu à son retour par les bruyantes acclamations de son peuple. Un homme l’appelait brave, un autre furieux, un autre irrésistible. Ces louanges lui plaisaient, et l’un des convives, rempli du sentiment populaire, répétait au banquet les épithètes variées dont il avait été salué :

Edmond — le brave chef — intrépide à la guerre — irrésistible dans le combat — a mis en pièces ses ennemis à —

» Telle est la substance d’un poëme anglo-saxon.

» Mais quand il arrivait que ces harangues flattaient la vanité des chefs et excitaient leur libéralité, la construction de la périphrase était l’objet d’un travail plus considérable ; le compliment devait être parfois plus assaisonné et la périphrase se compliquait par instants de méta-

  1. History of the Anglo-Saxons, vol. III, lib. IX.