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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

tre les flammes, cherchant à les frapper de leurs dents venimeuses.

M. de Lorme entretint par ses discours une crainte salutaire des serpents chez sa fille, jusqu’au moment où la caravane atteignit le quartier de la Basse-Pointe. Il faisait jour ; au milieu des péripéties que nous venons d’énumérer, le court crépuscule qui précède le soleil avait passé inaperçu. En tournant la pièce de cannes qui marquait le coin d’une habitation, Yette fut éblouie par le nouvel aspect de la campagne qui s’étend jusqu’à la mer en une pente douce et fertile. La Basse-Pointe est le quartier le plus riche et le plus salubre de l’île.

On s’arrêta pour prendre le café. Yette, malgré les injonctions de son père, ne résistait plus à courir de tous côtés pour ramasser, selon son habitude, toutes les pierres, toutes les graines qu’elle rencontrait : les graines de réglisse rouge comme du corail et que nous nommons vulgairement graines d’Amérique, les pois mabouïa, sorte de gros haricot blanc attaché à une gousse ouverte et plate du plus beau cramoisi, et bien d’autres… Des chercheurs moins expérimentés se laisseraient prendre aux reflets de velours du pois-gratte, le fruit tentateur et perfide d’une liane élégante ;