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LE DÉPART.

toujours sans bruit. Par un mouvement irrésistible, Yette : tourna la tête, une dernière fois, du côté de la maison. Elle vit, sous les deux palmiers qui en précédaient l’entrée, une sorte de noire fourmilière qui s’agitait ; elle ne vit pas sa mère ; la pauvre femme venait de s’évanouir ; le chagrin, trop intense pour ses forces, était momentanément suspendu.

« Elle sera rentrée dans sa chambre, pensa Yette, elle va secouer son mouchoir à la fenêtre. »

Mais aucun mouchoir ne se montra en signe d’adieu. Alors, cachant sa tête dans les profondeurs du hamac, elle se mit à pleurer tout à son aise.

La grande da, sur son petit criquet de cheval créole, haut comme un âne, affectait charitablement de ne pas la regarder, et M. de Lorme fumait d’un air de mauvaise humeur son cigare, dont la fumée lui entrait sans doute dans les yeux, car il ne cessait de les frotter du revers de sa main.

Les accidents de la route ne tardèrent pas cependant à occuper Yette. Il faut le pied sûr des chevaux indigènes, qui ne bronchent pas plus que les mulets des Alpes, pour venir à bout des obstacles qu’offre le chemin escarpé du Macouba à la