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LES ADIEUX.

présents réussirent à distraire un peu Yette de son sacrifice. Du reste, on ne lui laissait pas le temps d’y penser beaucoup. C’étaient chaque jour des invitations, des fêtes en son honneur chez les voisins ; la veille même de son départ, un de ces pique-nique au bord de l’eau, que l’on nomme parties de rivière, fut organisé.

On y porta le calalou, cette classique purée d’herbes mucilagineuses cuites avec du lard et brassée d’un coup de lélé, d’un coup de bâton à cinq branches que l’on roule rapidement entre les mains,

Bien entendu, le calalou n’est qu’un prétexte à divertissements variés ; on est en costume de bain, on se baigne avant, pendant et après le repas, on pêche des ceriques. Cette fois un lieu particulièrement favorable avait été choisi : un bassin ombreux et profond, formé par les obstacles qui retenaient en amont les eaux torrentueuses de la rivière. Après le calalou on grilla, en plein air, sur des charbons, la morue, la morue assaisonnée d’huile et de piments ; on ajouta le court-bouillon mulâtre, la fricassée de volaille brune, à ce menu délicieux. Les enfants usèrent du droit, inséparable de toute partie de rivière bien organisée, de manger avec leurs doigts. Bien n’y