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LES VRAIS CHAGRINS.

avait choisies était passé. Il est vrai que Mlle Aubry l’emmenait parfois en promenade soit au Bois de Boulogne, soit aux environs de Paris, et qu’elle s’était sincèrement attachée à Mlle Agnès, depuis qu’elle savait que la sous-maîtresse ne sortait pas parce qu’elle n’avait plus de mère.

« Oh ! mon Dieu ! lui disait-elle, moi qui suis si triste d’être éloignée de la mienne pour un peu de temps, qu’est-ce que je deviendrais si je ne devais jamais la revoir ?… »

Hélas ! la pauvre Yette devait être bientôt frappée, elle aussi, par ce malheur, qui la pénétrait de compassion ! Un jour que, dans le salon de musique, elle répétait la fameuse sonate en accrochant toujours les mêmes notes et en se demandant avec inquiétude si elle parviendrait à la bien jouer pour l’arrivée de sa maman, Mlle Aubry entra, une lettre à la main. La directrice était encore plus pâle que de coutume et ses yeux paraissaient cerclés de rouge.

« Yette, commença-t-elle, — c’était la première fois qu’elle lui donnait ce nom familier, ayant l’habitude d’interpeller cérémonieusement ses élèves par leur nom de famille, — Yette, je viens de recevoir une lettre qui vous concerne… Vous reverrez très prochainement, je pense…