où le ciel vous réservait de si horribles surprises. D’ailleurs, on avait parlé en classe de la manne des Israélites dans le désert, et elle persistait à croire que ces flocons, qui devaient avoir un goût sucré, seraient peut-être pour elle au besoin une ressource alimentaire. Tout d’une haleine, elle courut au vieux lierre. L’échelle était encore là. Yette fut vite au sommet en se cramponnant bravement de ses petites mains déjà rouges d’engelures aux bâtons chargés de neige. Une fois sur la crête, elle regarda devant elle et vit une grande rue déserte bordée de rares réverbères déjà allumés ; cette rue, si laide qu’elle fut, lui représenta tout ce qu’il y a au monde de plus beau : la liberté.
« Je n’ai qu’à tirer l’échelle et à l’appliquer de l’autre côté du mur, » se dit Yette avec intrépidité.
L’entreprise offrait plus de périls qu’elle ne pensait, l’échelle étant longue, assez lourde et l’équilibre difficile à garder. Déjà la voix de Mlle Agnès l’appelait à l’autre bout du jardin. Yette essaya cependant et parvint, en employant toute son adresse et toute sa force, à ébranler I’échelle, à la soulever même ; mais de là, hélas ! à l’attirer jusqu’à elle, il y avait loin ! Ses mains