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TRAGEDIE.

Que ne tiens-je ton cœur ſous mes avides dents,
Et que ne puiſ-je faire en mes deſirs ardens,
En te le devorant, & rongeant tes entrailles,
À ton corps demy-vif de longues funerailles !
Soyez les inſtrumens de mon juſte couroux,

Elle parle à Pâris & à Deiphobe.

Perdez-vous pour le perdre, & qu’il tombe ſur vous :
Ne peut-on pas punir ce cruel adverſaire ?
Quoy, n’eſt-il pas vivant, n’a-t’il pas une mere
Qui craint de voir trop toſt ſes beaux jours abregez,
Qu’il meure, qu’elle pleure, & nous ſommes vangez.
Pour Hector, & Troïle animez vos coleres,
Car vous ne m’eſtes rien, ſi vous n’eſtes leurs freres.

Deiphobe.

Nous ferons voir, Madame, à voſtre majeſté
Que nous tenons beaucoup de ce qu’ils ont eſté.

Pâris.

Ouy, nous luy ferons voir mourant en braves hommes
Ce qu’Hector nous eſtoit, & ce que nous luy ſommes.

Hecube.

Dans ce noble deſſein vous ne pouvez perir,
Et le jour eſt venu qu’Achille peut mourir,
Le perfide qu’il eſt, ce deteſtable Achille
Demande Polixene en me rendant Troïle,