Page:Benserade - La Mort d’Achille et la dispute des armes.djvu/58

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
51
TRAGEDIE.

Ses regards menaçants ſont des éclairs d’horreur,
Et ſon front eſt un ciel où tonne la terreur,
Il a trop de furie, & gagne plus de gloire
Dans l’ardeur d’un combat que dans une victoire,
Son courroux devroit eſtre un peu moins violent,
Il eſt brave, il eſt fort, mais il eſt inſolent,
Comme il a du courage, & comme il hait Achille,
Il croit que la dépouïlle en eſt aſſez facille,
Penſe l’épouvanter, & croit que ce vainqueur
Aprehende le frere, & n’ayme pas la ſœur,
Sa vaillance deffie un qui vous idolâtre,
Qui nous permet de vaincre, & nous laiſſe combattre,
Et ſa temerité le porte aveuglement,
Une pique à la main, juſqu’au retranchement,
Viens, laſche, viens, poltron, parois devant Troïle,
(Ce ſont ſes propres mots) es-tu ce brave Achille ?
Sois-le contre celuy qui s’oppoſe a tes veux,
Vien me donner la mort pluſtoſt que des Neveux.
À quoy que ſa promeſſe, & ſon amour l’engage,
Achille n’eſt pas homme à ſouffrir un outrage.

Polixene.

Où va-t-il s’engager ?

Hecube.

Où va-t-il s’engager ? Quel accident voilà,
Dieux ! mais pourquoi le craindre ? ils n’en viendront pas là,