sur la cheminée. Et c’est Madame Grandgoujon qui reprit :
— On l’a aigri… Poulot était prêt à faire tout pour la France, mais on l’a traité comme un embusqué… et après comme un chien !
— Madame, reprit Colomb, plus familier, il y a autre chose. Regardez ce petit œil d’éléphant… Grandgoujon, qu’est-ce que vous cachez ?
Grandgoujon se tourna, et bourru mais bonhomme :
— Mon vieux, moi, je suis un homme de quarante ans… J’ai vu, moi ! Je sais maintenant que tout marche à la va comme je te pousse…
— Grandgoujon !
— Et qu’alors vous autres, vous agitez dans le vide ! Nous vivons une histoire immense, noire et rouge, mon vieux, avec des morts par millions, des héros et des fripouilles. Des discours, quelle blague ! Tenons-nous-en aux faits.
Et s’écoutant parler lui-même, il était pris d’une subite émotion, qui l’amena à continuer sur soi :
— J’ai été chez un nouveau médecin. Je lui ai confié : « Docteur, je suis aérophage ». Il m’a répondu : « Des mots, Monsieur : si on s’en tient aux faits, de l’air… vous n’en avalez pas assez ! » Colomb, soyons réalistes !
— Me dire ça à moi, cria Colomb, saisissant sa tête à deux mains, moi, l’action faite homme !
De sa poche il tirait des papiers.
— Est-ce qu’il n’y a que des mots là-dedans ?