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abordait ce triste sujet. Il s’y était repris à plusieurs fois, mais, étouffé par ses sanglots, il déchirait le papier, s’essuyait les yeux, et courait chercher ailleurs un peu de calme.

Toute la « grande maison » était en rumeur ce jour-là : on attendait massa Georgie. Madame Shelby s’établit au salon, où un pétillant feu de bois dissipait les froides brumes d’un soir d’automne. Le couvert, resplendissant d’argenterie et de cristaux, avait été mis pour le souper sous l’inspection de notre ancienne amie, tante Chloé.

Parée d’une robe de cotonnade neuve, d’un tablier blanc, et d’un haut turban bien empesé, sa face noire et luisante rayonnant de satisfaction, Chloé mettait la dernière main aux arrangements de la table, avec une minutieuse ponctualité, qui lui servait aussi de prétexte pour rester et causer un peu avec « maîtresse. »

« Là ! à présent que tout est en place, dit-elle, semblera-t-il pas à massa Géorgie avoir pas bougé ? voilà son assiette juste où il la lui faut, — pas loin du feu, massa Géorgie aimer bien toujours une bonne place chaude. Oh ! y a qu’à me laisser faire ! Pourquoi donc que Sally a pas tiré la belle théière, — la neuve, que massa Georgie a donnée à maîtresse, pour Noël ? m’en vais la chercher, moi. — Maîtresse a eu des nouvelles de massa ? dit-elle d’un ton interrogateur.

— Oui, Chloé, une ligne ou deux, rien que pour dire qu’il sera ici ce soir, s’il le peut ; — c’est tout.

— Et massa pas dire un petit mot de mon vieux ? — rien ? demanda-t-elle, s’affairant autour des tasses.

— Non, il n’en parle pas, Chloé, et dit seulement qu’il nous racontera tout à son retour.

— Bien pareil à massa Georgie, ça ! Petit garçon, lui vouloir toujours dire les choses lui-même. Oh ! moi, bien connaître massa Georgie ! De fait, je sais pas pourquoi les blancs font comme ça un tas d’écritures ; — c’est une façon de besogne si longue et si malaisée ! »