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Et comment alors la pauvre enfant gardera-t-elle sa foi ? Elle pense à tout cela, et, tenant sa fille entre ses bras, elle la voudrait moins belle. Elle se rappelle l’éducation qu’Emmeline a reçue, si pure, si chaste, si fort au-dessus de sa condition, et elle s’en afflige presque. Sa seule ressource est de prier. Du fond de ces dépôts-prisons, si bien tenus, si propres, si convenables, que de prières ont montées jusqu’à Dieu ! — prières que Dieu ne met pas en oubli, comme on le verra au jour à venir, car il est écrit : « Quiconque scandalisera l’un de ces petits qui croient en moi, il lui vaudrait mieux qu’on mit une pierre de meule autour de son cou, et qu’on le jetât dans la mer[1]. »

Un doux et calme rayon de la lune descend d’en haut, et dessine, sur les groupes endormis, l’ombre des barreaux de la fenêtre. La mère et la fille chantent ensemble, sur un air bizarre et triste, un cantique composé par des esclaves, sorte d’hymne funèbre consacré parmi eux.


Où donc est la pauvre Marie,
Qui pleurait, pleurait sans répit ?
Où donc est la pauvre Marie ?
Elle a gagné le paradis !

Personne plus ne l’injurie,
Ne la frappe, ne la maudit ;
Morte, elle est l’heureuse Marie,
Elle a gagné le paradis !

Ces paroles, chantées par des voix douces et mélancoliques, au milieu d’une atmosphère imprégnée des soupirs du désespoir exhalés vers le ciel, résonnaient, à travers les sombres salles de la prison avec un accent pénétrant.


Oh ! chers amis, qui peut nous dire

  1. Évangile selon saint Marc, ch. IX, verset 42.