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métier as-tu fait là ? arraches-tu les fleurs, à présent ? Et un soufflet bien appliqué résonna presque aux oreilles d’Éva.

— Seigneur, maîtresse ! — ça être tout pour miss Éva, répondit la voix de Topsy.

— Éva ! beau prétexte ! — que veux-tu qu’elle fasse de tes fleurs, petite négresse bonne à rien ? — Voyons ! te sauveras-tu ! »

À la minute Éva s’élança de sa couche, et parut sous la véranda.

« Oh ! maman, ne la renvoyez pas ! — J’aime ses fleurs, — donnez-les-moi. J’en ai tant d’envie !

— Éva ! — mais votre chambre en est déjà toute pleine ?

— Je n’en saurais avoir trop. Topsy, apporte-les-moi donc. »

La petite négresse, demeurée à l’écart, tête basse et toute renfrognée, se rapprocha, et présenta ses fleurs, non plus de son air mutin, hardi, insouciant, mais avec une timidité, une hésitation, un respect, tout à fait nouveaux chez elle.

« Quel beau bouquet ! » dit Éva, le considérant.

L’épithète d’original eût été plus juste ; — c’était un brillant géranium écarlate, avec un seul camélia blanc entouré de ses feuilles lustrées. Le même goût bizarre, qui s’était plu au contraste si tranché des couleurs, avait scrupuleusement étudié la disposition de chacune des feuilles.

Topsy parut charmée lorsque Éva lui dit : « Sais-tu que tu arranges fort joliment les fleurs ? — Tiens, voilà ce vase qui est vide. — Je serais bien aise d’avoir tous les jours, pour le garnir, un bouquet de ta façon, Topsy.

— Quelle idée baroque ! reprit Marie ; à propos de quoi, et pourquoi faire ?

— Qu’importe, maman, vous aimez autant que Topsy fasse cela qu’autre chose, — n’est-ce pas ?