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— Oh ! bien haut dans les nuages, miss Éva !

— Alors, je la vois, je pense. — Regardez ces nuages ! c’est comme de grands portails de nacre ; et au delà, loin, loin au delà, — c’est tout d’or, Tom. Chantez-moi donc les esprits brillants. »

Tom chanta l’hymne bien connue des méthodistes :

Je les vois ces esprits brillants,
Au sein de l’éternelle gloire,
Tout couverts de vêtements blancs :
Ils chantent l’hymne de victoire !

« Oncle Tom, je les ai vus ! dit Éva. »

Tom n’éprouva ni doute ni surprise. Éva lui aurait dit qu’elle avait été ravie au ciel, qu’il eût trouvé la chose assez naturelle.

« Ils viennent me visiter quand je dors, ces esprits, » dit-elle ; et ses yeux se voilèrent, comme elle chantait tout bas :

Je les vois ces esprits brillants,
Au sein de l’éternelle gloire,
Tout couverts de vêtements blancs.

« Oncle Tom, poursuivit-elle, j’y vais…

— Où, miss Éva ? »

L’enfant, debout, de sa petite main, montra le ciel ; et les yeux levés en haut, plongée qu’elle était dans les splendeurs du couchant, ses cheveux dorés, ses joues rougissantes, brillèrent d’un éclat divin.

« Je vais là ! répéta-t-elle, vers les esprits brillants, Tom ! j’irai avant peu. »

Le tendre et fidèle cœur ressentit un choc soudain. Tom se souvint que, depuis six mois, les petites mains d’Éva lui avaient souvent paru grêles ; sa peau devenait plus transparente, son souffle plus court. Elle se fatiguait vite, et demeurait toute languissante pour peu qu’elle