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ce que, malgré ma pauvre santé, j’ai pu sauvegarder d’autorité. Je prends mon nerf de bœuf, et leur en applique parfois quelques coups ; mais c’est un exercice beaucoup trop fatigant pour moi. Si Saint-Clair voulait seulement faire comme les autres !

— Et que font-ils ?

— Ils les envoient à la Calebousse, ou ailleurs, pour qu’on les fouette. C’est l’unique moyen. Si je n’étais pas une pauvre femme souffreteuse, je crois que je les conduirais avec deux fois l’énergie de Saint-Clair.

— Comment parvient-il donc à en être obéi ? vous dites qu’il ne les frappe jamais.

— Les hommes, vous le savez, ont un plus grand air de commandement que nous ; cela leur est plus facile. Puis, si vous avez jamais observé les yeux de Saint-Clair avec attention (c’est très-singulier), vous aurez vu que, quand il parle d’un ton ferme, ses yeux étincellent. J’en suis parfois presque interdite, et les esclaves savent alors qu’ils doivent plier. Je ne puis en obtenir autant, avec une tempête et des cris, que Saint-Clair avec un éclair de ses yeux, quand il est monté. Ils se taisent devant Saint-Clair, et de là vient son indifférence pour ce que j’endure, moi ! Vous verrez, quand il vous faudra les faire marcher, qu’on n’en peut rien obtenir sans sévérité. Ils sont si mauvais, si trompeurs, si paresseux !

— Toujours le vieux refrain ! interrompit Saint-Clair entrant nonchalamment. Et quel beau modèle ont à copier ces méchantes créatures, surtout pour la paresse ! Voyez, cousine, ajouta-t-il, en se jetant tout de son long sur le sofa opposé à celui de Marie, voyez, cousine, si leur paresse n’est pas tout à fait impardonnable, lorsque nous leur donnons, Marie et moi, un si brillant exemple !

— Allons ! Saint-Clair, vous êtes par trop maussade ?

— Moi aussi ? je croyais tout à fait bien parler, d’une façon remarquable pour moi ! Je fortifie toujours vos observations, Marie.