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chargé d’une petite malle ; elle lui adressait la parole de temps à autre. Elle avança gaiement jusqu’à la planche, qu’elle franchit d’un pas rapide. La cloche tinta, la vapeur siffla, la machine gémit, haleta, et le bateau descendit la rivière.

La femme se faufila entra les caisses et les ballots qui encombraient l’entrepont, et s’asseyant, elle se mit à gazouiller avec son nourrisson.

Après avoir fait un tour ou deux dans le bateau, Haley s’approcha d’elle ; il lui dit quelques mots d’un ton indifférent.

Tom vit un nuage sombre passer sur le front de la femme, comme elle répondait avec une grande véhémence :

« Je ne le crois pas ; je ne veux pas le croire ! vous vous jouez de moi !

— Si vous ne voulez pas le croire, regardez plutôt ! dit le marchand, tirant un papier. Voilà le contrat de vente, et en bas le nom de votre maître. Je l’ai payé en bel et bon argent, je puis vous le dire.

— Je ne peux pas croire que maître ait voulu me tromper ainsi, reprit-elle, avec une agitation croissante.

— Vous n’avez qu’à demander au premier venu qui sait lire l’écriture, Hé ! par ici ! dit Haley à un homme qui passait. Tenez ! lisez haut ce papier. Cette fille s’entête à ne pas me croire, quand je lui dis ce qui en est.

— C’est un contrat de vente, signé par John Fosdick, dit l’homme, qui vous cède la fille Lucie et son enfant. C’est bien en règle, pour ce que j’y vois. »

Les exclamations passionnées de la femme attirèrent autour d’elle une foule de curieux, et le marchand leur expliqua sommairement de quoi il s’agissait.

« Il m’a dit qu’il m’envoyait à Louisville, pour me louer comme cuisinière dans la taverne où travaille mon mari, s’écria-t-elle. C’est là ce que maître m’a dit lui-