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LES MYSTÈRES DE L’ÎLE SAINT-LOUIS

En ce moment même, le capitaine la Ripaille apparut et vint saluer le comte d’un air triomphant.

— Madame, dit le comte à Teresina en la quittant, permettez que je dise deux mots à cet homme.

Et il ajouta en prenant à part le capitaine :

— Eh bien, qu’avez-vous vu, qu’avez-vous à me dire ?

— Eh bien, monseigneur, je l’ai vu, je l’ai suivi maintenant, je le reconnaîtrais entre mille. Oui, grâce à la forme de sa rapière et à certaine touffe de rubans…

— Enfin, quel est cet homme, monsieur ? répondez, demanda Charles.

— Pardieu ! monseigneur, c’est l’homme de l’autre nuit, mon raffiné du Palais-Cardinal, celui qui m’a fait loger, aux frais de Sa Majesté, au Châtelet.

— Et cet homme a parlé à la comtesse ?

— Pour cela, monseigneur, je vous réponds de lui, je ne l’ai pas quitté d’un instant.

— Alors vous étiez dans ce boudoir avec lui ?

— Du tout, monseigneur, nous n’avons pas quitté le grand salon. Croiriez-vous qu’il n’a pas dansé seulement une sarabande, encore moins levé son masque ? Mais tenez, le voici… Que regarde-t-il donc, avec son air scrutateur ? Un domino dont le capuchon est rabattu, et qui vient de se diriger sur le balcon… Je voudrais savoir ce qu’ils peuvent observer de là. Monseigneur, pardonnez-moi, mais je me remets à mon poste.

— Allons, s’écria Charles avec rage, il est écrit que je ne pourrais rien savoir ! Madame la comtesse, poursuivit-il, la collation est servie, venez.

Et Charles, aussi pâle cette fois que Teresina, lui offrit la main pour passer dans la salle où le banquet se trouvait servi.

— Arrêtez, noble comte, s’écria le masque placé sur le seuil du balcon, arrêtez aussi, vous tous qui l’entourez ! Il manque un convive à cette fête, et ce convive, le voila !