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LES MYSTÈRES DE L’ÎLE SAINT-LOUIS

Sur ces entrefaites, et comme les archers venaient de gagner le bout de la rue, minuit sonna à l’église de l’Oratoire. La petite porte s’ouvrit lentement.

Un homme masqué en sortit, il posa la main sur le champion assez heureux pour avoir échappé aux griffes du guet.

— Bien, murmura-t-il, capitaine la Ripaille ; vous m’attendiez.

Minuit sonne, poursuivit-il. Vous devez bien penser que je ne vous ennuierai pas de longs discours. Je sors du bal, où j’ai vu Son Éminence. Il a été convenu entre elle et moi qu’on vous chargerait d’une commission pressée. À l’extrémité de l’île Saint-Louis s’élève maintenant un hôtel que se fait bâtir un comte italien du nom de San-Pietro. Vous le savez ?

Celui auquel s’adressait l’homme masqué baissa la tête en signe d’affirmation.

— Vous connaissez cet hôtel ? L’architecte qui en dirige le travail est un certain Pompeo… Il faudra savoir au juste quand il y entre ou quand il en sort. Demain, à pareille heure, il faut qu’il n’y rentre plus… Vous comprenez, n’est-ce pas ?

— Monseigneur sera obéi.

— Le coup fait, vous passerez en Lorraine deux mois seulement. Là j’aurai soin de vous, de votre avancement ; je vous le promets.

L’homme masqué s’attendait à une réponse, et paraissait prêt à quitter ensuite la place, quand tout d’un coup il poussa un cri étouffé. Ses mains se voyaient serrées par celles de son interlocuteur comme dans un étau de fer.

— Y songez-vous, capitaine ? quel accès vous prend ? lui demanda-t-il ; quittez-moi !

— Je ne te quitte plus, reprit une voix qui fit tressaillir l’homme masqué au fond des entrailles. Vaincu par la surprise et la douleur, il n’osait crier. Au lieu de la Ripaille, il avait devant lui Pompeo.

— Oui-da ! reprit celui-ci, en n’ayant garde de lâcher le