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la recherche de la vérité ; nous seuls l’avons trouvée sur terre. »

J’ai quelquefois entendu révoquer en doute la pureté des mœurs des shakers et soutenir qu’alors même que tous les hommes et toutes les femmes de l’univers se dévoueraient au célibat des trembleurs, le monde ne finirait pas ; mais le plus communément on n’attaque point les shakers sous ce rapport ; on leur fait un autre reproche qui me paraît plus fondé : on prétend que les chefs de la société manquent de bonne foi. Comme on entre dans l’association avec ou sans fortune, le grand profit est pour ceux qui n’apportent rien : les riches sont les dupes.

On ne voit pas, du reste, bien clairement la cause qui peut pousser dans cette congrégation une personne de bonne foi. Le quaker shaker n’abandonne point complètement le monde ; il entretient avec ses semblables tous les rapports utiles à son bien-être.

Je comprends le trappiste, fuyant la société des hommes, se vouant à la solitude, en passant sa vie à creuser son tombeau. La récompense morale est dans la grandeur même du sacrifice ; mais quel est le mérite du solitaire, prenant au monde une partie de ses avantages, et repoussant l’autre, on ne sait pourquoi ?

S’il était possible de lire au fond des cœurs, on verrait peut-être que la vanité est le principal mobile des trembleurs. La bizarrerie même de leur culte n’est-elle pas précisément ce qui les y attache ? La plupart des shakers sont d’assez médiocres gens ; tous cependant ont une scène et un public : sans leur absurdité, qui parlerait d’eux ? Les formes sous lesquelles se produit l’orgueil des hommes sont infinies.

Quoi qu’il en soit, on ne peut s’empêcher, en présence d’un pareil spectacle, de déplorer la misère de l’homme et la faiblesse de sa raison.

Il n’est pas rare que les autres sectes protestantes tournent en dérision le culte des shakers.

Mais la communauté des trembleurs est-elle donc la seule qui soit tombée dans de tristes écarts ?

La secte des quakers proprement dite a mieux compris qu’aucune autre ce qu’il y a de moral dans l’homme. Nulle