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servira, dans l’état actuel des choses, à les prévenir, et, loin de nuire à aucune des parties, tournera au profit des deux. »[1]

Voici comment un presbytérien m’expliquait un jour l’animosité de sa secte contre les unitaires : « Les différents cultes se tolèrent mutuellement, me disait-il, parce que, bien que divergents entre eux, ils ont une base commune, la divinité de Jésus-Christ… mais les unitaires, en niant la divinité du Christ et tous les dogmes généralement adoptés, ont fait du christianisme une philosophie : or, la religion et la philosophie ne peuvent s’accorder ensemble ; celle-ci est ennemie de toutes les croyances ; elle s’en prend, non à une partie du culte, mais au culte tout entier ; c’est, entre elle et la religion, une question de vie et de mort. » On comprend maintenant le sentiment hostile dont sont animées toutes les sectes religieuses envers les unitaires. Les catholiques sont peut-être, de tous les chrétiens des États-Unis, ceux qui s’affligent le moins du progrès du socianisme : ils pensent qu’on finira par ne voir en Amérique que deux religions, le catholicisme, c’est-à-dire le christianisme basé sur l’autorité, et le déisme, c’est-à-dire la religion naturelle fondée sur la raison. Ils croient en outre qu’un culte extérieur étant nécessaire, et la religion naturelle n’en comportant aucun, tous ceux qui seront sortis du christianisme pour entrer dans la philosophie, reviendront à la religion chrétienne par le catholicisme.

On voit que l’inimitié des sectes protestantes contre les unitaires, et leur haine contre les catholiques, ont des causes tout opposées : elles reprochent à ceux-ci de tout croire, à ceux-là de ne croire rien ; aux uns de proscrire le droit d’examen, aux autres d’en abuser.

Entre ces deux points extrêmes, le catholicisme et l’unitairianisme, il existe un espace immense occupé par une multitude d’autres sectes : mille degrés intermédiaires se montrent entre l’autorité et la raison, entre la foi et le doute ; mille tentatives de la pensée toujours élancée vers l’inconnu, mille essais de l’orgueil qui ne se résigne point à ignorer. Tous ces

  1. Spirit of the pilgrim, july 1831.