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« À la place de l’unité religieuse qui règne en France depuis quinze siècles, supposez mille sectes dissidentes, vous n’aurez à cette heure ni grandes églises, ni grands orateurs chrétiens, ni Notre-Dame, ni Bossuet.

XLII.

« Les congrégations protestantes n’ont point, pour se rassembler, des temples magnifiques, décorés de statues et de tableaux ; elles s’enferment dans de simples maisons, bâties sans luxe et à peu de frais. Le plus splendide parmi leurs édifices religieux se montre soutenu par quelques colonnes de bois peint : c’est là leur Parthénon. Otez a l’Amérique son Capitole, expression poétique de son orgueil national, et la Banque des États-Unis, expression poétique de sa passion pour l’argent, il ne restera pas dans ce pays un seul édifice qui présente l’aspect d’un monument.

XLIII.

« Tout, aux États-Unis, procède de l’industrie, et tout y va… mais à la différence du sang qui s’échauffe en allant au cœur, tous les élans, en atteignant l’industrie, se refroidissent à ce cœur glacé de la société américaine.

XLIV.

« Laissez grandir cette société, disent quelques-uns, et vous en verrez sortir des hommes illustres dans les lettres et dans les arts. Rome naissante n’entendit point les chants d’Horace et de Virgile, et il a fallu quatorze siècles à la France pour enfanter Racine et Corneille.

« Ceux qui tiennent ce langage confondent deux choses bien distinctes : la société politique et la civilisation. La société américaine est jeune, elle n’a pas deux siècles. Sa civilisation, au contraire, est antique comme celle de l’Angleterre dont elle descend. La première est en progrès, la seconde, en déclin. La société anglaise se régénère dans la démocratie américaine : la civilisation s’y perd.