Page:Beaumont - Marie ou l’esclavage aux États-Unis, éd. Gosselin, 1840.djvu/139

Cette page n’a pas encore été corrigée

ce tact fin et subtil, ce sentiment délicat, mélange de passion et de jugement froid, d’enthousiasme et de raison, de nature et d’étude, qui président, en Europe, aux compositions littéraires. Pour avoir de l’élégance dans le goût, il en faut d’abord dans les mœurs.

XXXIII.

« Ni dans les journaux, ni à la tribune, le style n’est un art. Tout le monde écrit et parle, non sans prétention, mais sans talent. * Ceci n’est pas la faute seule des orateurs et des écrivains ; ces derniers, quand ils font du style brillant et classique, mettent en péril leur popularité : le peuple ne demande à ses mandataires que tout juste ce qu’il faut de littérature pour comprendre ses affaires ; le surplus, c’est de l’aristocratie.

[Note de l’auteur. * Réf. ]

XXXIV.

« C’est ainsi que les lettres et les arts, au lieu d’être invoqués par les passions, ne viennent en aide qu’à des besoins ; ou si quelque penchant pour les beaux arts se révèle, on est sûr de le trouver entaché de trivialité : par exemple, il existe, aux États-Unis, un genre de peinture qui prospère : ce sont les portraits ; ce n’est pas l’amour de l’art, c’est de l’amour-propre.

XXXV.

« Vous rencontrerez parfois, dans ce monde industriel et vulgaire, un cercle poli, brillant, au sein duquel les travaux de l’art sont appréciés avec goût, et les œuvres du génie admirées avec enthousiasme : c’est une oasis dans les sables brûlants d’Afrique. Vous trouvez çà et là une imagination ardente, un esprit rêveur ; mais un seul poète dans un pays ne fait pas plus une nation poétique que l’accident d’un beau ciel sur les bords de la Tamise ne fait le climat d’Italie.

XXXVI.

« Quoiqu’il n’existe point de littérature proprement dite aux États-Unis, ne croyez pas que les Américains soient sans