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me, et un jeune homme qui avait la plus belle physionomie du monde. On demanda à cette femme par quelle raison elle ne rendait pas la liberté à sa maîtresse, qui était une bonne vieille. C’est, répondit-elle, parce qu’ayant été son esclave vingt ans, il est juste que j’aie ma revanche pendant un pareil nombre d’années ; je suis lasse d’obéir, et je veux goûter plus long-tems le plaisir de commander à mon tour. Cette esclave se nommait Bélise. Dans ce moment ce jeune homme qui avait une si belle physionomie, et qui se nommait Zénon, s’avança, et dit au juge : Je ne me suis point avancé pour signer l’acte de la liberté de mon maître, parce qu’il a cessé d’être esclave au moment que j’ai eu la liberté de le traiter selon ma volonté. Je lui demande bien pardon d’avoir été obligé de le maltraiter pendant huit jours. La loi m’ordonnait de copier les mauvaises façons qu’il avait eues à mon égard ; mais je vous assure que j’ai souffert plus que lui.