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sait cela, les servantes mettaient la table, et le prince admirait la fée qui leur faisait mille questions, seulement pour avoir le plaisir de parler : il admirait sur-tout une femme-de-chambre, qui, à propos de tout ce qu’elle voyait, louait sa maîtresse sur sa discrétion. Parble !, pensait-il en mangeant, je suis charmé d’être venu ici. Cet exemple me fait voir combien j’ai fait sagement de ne pas écouter les flatteurs. Ces gens-là nous louent effrontément, nous cachent nos défauts, et les changent en perfection ; pour moi je ne serai jamais leur dupe ; je connais mes défauts, Dieu merci. Le pauvre Désir le croyait bonnement, et ne sentait pas, que ceux qui avaient loué son nez se moquaient de lui, comme la femme-de-chambre de la fée se moquait d’elle ; car le prince vit qu’elle se retournait de tems en tems pour rire. Pour lui, il ne disait mot, et mangeait de toutes ses forces. Mon prince, lui dit la fée, quand il commençait à être rassasié ; tournez-vous un peu, je vous prie ; votre