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lité de ces armes. Elles ont d’abord servi aux corps francs à l’époque de la dernière révolution tentée par les patriotes hollandais, ensuite vendues aux Belges, qui en ont aussi fait usage dans le temps de leur révolution ; elles ont enfin été achetées par des négociants hollandais, de qui vous les tenez.

« Je conviens qu’un cautionnement de cinquante mille florins, demandé pour lever l’embargo mis sur de vieux fusils, vous dégagerait sans doute d’un embarras bien grand, de savoir où les placer. Je conviens que le traité passé entre vous et l’ex-ministre Lajard est fort avantageux ; mais soyez de bonne foi, citoyen, et convenez à votre tour que nous serions bien dupes d’approuver un pareil traité et d’y donner notre adhésion. Nos vues et nos principes ne s’accordent point avec ceux de nos prédécesseurs. Ils ont eu l’air de vouloir ce qu’ils ne voulaient pas ; et nous, bons patriotes, bons citoyens, désirant sincèrement faire le bien et le voulant, nous remplissons les devoirs de notre place avec autant de loyauté, de probité, que de franchise 11.

" Depuis quelque temps je ne me mêle plus d’achats d’armes. Ces opérations mercantiles ne s’accordent guère avec le genre de travail et de connaissances qu’exige mon département. Dans un moment pressant, où il fallait de toute nécessité des fusils, on s’est jeté avidement sur tout ce que l’on a trouvé. Actuellement que les mêmes besoins n’existent plus, le ministre de la guerre s’attache principalement à la bonté des fusils et au prix modéré. Ce n’est donc plus mon affaire, et j’ai cessé de m’en occuper. Retournez-vous du côté du citoyen Pache, et adressez-lui vos réclamations: c’est à lui à prononcer, et à vous dire si elles sont justes et fondées.

ci Quant à moi, je ne suis plus en mesure ni en position de rien faire el décider sur un objet, comme vous savez, hors du ressort de mon département.

« Le ministre des affaires étrangères, « Lebiiun. ■>

« P. S. J’ai envoyé copie de votre lettre au mini-tri’ de la guerre; je recevrai incessamment sa i, dont je vous ferai parvenir la copie. » Ah ! grand Dieu ! m’écriai-je après ma lecture achevée, vit-on jamais rien de semblable ? El c’était pour finir ainsi que l’on m’envoyait en Hollande ! <"’déteMable perfidie !

Dans le premier mouvement de mon indigna lion, j’avais lutté, par macoïère, contre l’ironie du ministre. J’opposais à l’hypocrisie de son fatal patriotisme ses basses requêtes et ses perfides lettres à l’empereur Joseph contre la liberté brabançonne en ta, bon patriote ! aimant la liberté ! Il a donc bien changé depnis 1788 !

et 1788, et je mettais h gazetier à jour. Mes amis n’ayant pas souffert que ce premier élan trop amer m’échappât, je pris le pénible parti de raisonner avec qui m’insultait. Quand mes sens furent apaisés, je lui écrivis ce qui suit. Ah ! je prie mes lecteurs d’en dévorer l’ennui. C’est le secret de relie comédie terriblel « La Haye, ce 16 novembre 1792.

« Citoyen ministre,

« En réponse à l’unique lettre que j’aie jamais reçue de vous, en date du 9 novembre, je vous préviens que les difficultés qui clouaienl a Tervêrt les fusils de Hollande sonl levées, grâce à bumourkz, à l’instant où l’intrigue de la bureaucratie français* en fait renaître de nouvelles, pour les y river si elle peut.

• Vous êtes un homme trop honnête pour avoir lu, en la signant, la perfide ironie que l’on m’envoie en votre nom.

« Vous auriez réfléchi qu’il ne s’agit ici d’aucun embarras de ma part de vendre ces urines a pi 1 so ? wii, puisque depuis huit mois mon premier traité les attacki à la France ; que depuis quatre mois le second traité vous démontre que deux ministres et teois comités réunis onl relu-.’de les en détacher, lorsque, las des repoussoirs de nos ministres patriotes, je demandai très-net qu’on me permit d’EN disposer, pouvant le faire alors avec grand avantage, s’il était vrai que la France n’en voulût plus. « Vous auriez réfléchi que, ne pouvant être à la fois propriétaire et dépouillé pat l’actt du 18 juillet, je n’ai plus d’autre soin que de livrer ces aune— ; que, dans la position contraire, j’en serais maintenant d’autant moins empêtré, que votre élu Constantin m’en a l’ait offrir de nouveau par M. d< Mauldi les sept florins huit sous que ses grands associés me proposaient a l’abbaye, arec promessi d< m’en tin r si j’accédais à a marché. Vous auriez réfléchi encore, vous qui connaissez tant l’affaire comme commis, comme ministre, que, loin d’avoir jamais donné ces armes à personne pour ucutes. je n’ai cessé de dire et d’écrire à vous et à tous vos collègues qu’elles venaient dei Brabançons. Ci cautionnement exigé par l’empereur, du Hollandais que je dois en couvrir, n’est-il donc pas la preuve matérielle d’un fait qui vous battit h s oreilles crut fois ? Vos commis vous respectent peu, de vous faire dire dans celte lettre que vous apprenez à l’instant ce que vous savez bien que vous savez depuis su mois ! (.levons nommerai celui que vous devez gronder. I

« Vous auriez réfléchi en outre que, si ces armes eussent été neuves, je n’aurais pu vous les laisser au prix de huit florins banco, ou de quatorzi schellings ru or, ou de dix-sept fumes en crus, ou de tren^j livres en assignats (c’est tout un), quand vous aviez la bonhomie (que vousavez encore, messieurs) d’acheter pour trente schellings en or, à Londres,