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</poem>Du traître qui l’a prononcé !</poem> (Il tire son poignard ; tout le monde s’enfuit.) SPINETTE, soutenant Astasie.

Elle expire !

(Ator, rappelé à lui par ce cri, laisse aller Calpigi et les autres esclaves, et revient vers Astasie, que des femmes emportent chez elle. Atar y entre, en jetant à la porte sa simarre et ses brodequins, à la manière des Orientaux.)

SCENE V (Le théâtre est très-obscur.) CALPIGI, TARARE, un poignard à la main, prêt à frapper Calpigi qu’il entraîne.

CALPIGI s’écrie :

Ô Tarare !

TAHAHE, avec un grand trouble.

Ô fureur que j’abhorre !
Mon ami…, s’il n’eût pas parlé,
De ma main était immolé !

CALPIGI.

Tu le devais, Tarare ; il le faudrait encore,
Si quelque esclave curieux…

TARARE, troublé.

Mille cris de mon nom font retentir ces lieux !
Je me crois découvert, et que la jalousie…
Mourir sans la revoir, et si près d’Astasie !

CALPIGI.

Ô mon héros ! tes vêtements mouillés,
D’algues impurs et de limon souillés !…
Un grand péril a menacé ta vie !

tarare, à demi-voix.

Au sein de la profonde mer,
Seul, dans une barque fragile,
Aucun souffle n’agitant l’air,
Je sillonnais l’onde tranquille.
Des avirons le monotone bruit,
Au loin distingué dans la nuit,
Soudain a fait sonner l’alarme :
J’avais ce poignard pour toute arme.
Deux cents rameurs partent du même lieu ;
On m’enveloppe, on se croise, on rappelle ;
J’étais pris !… D’un grand coup d’épieu
Je m’abîme avec ma nacelle,
Et, me frayant sous les vaisseaux
Une route nouvelle et sûre,
J’arrive à terre entre les eaux,
Dérobé par la nuit obscure.
J’entends la cloche du beffroi.
L’appel bruyant de la trompette,
Que le fond du golfe répète,
Augmente le trouble et l’effroi.
On court, on crie aux sentinelles :
Arrête ! arrête ! On fond sur moi :
Mais, s’ils couraient, j’avais des ailes.
J’atteins le mur comme un éclair.
On cherche au pied ; j’étais dans l’air,
Sur l’échelle souple et tendue,
Que ton zèle avait suspendue.
Je suis sauvé, grâce à ton cœur :
Et, pour payer tant de faveur,
Ô douleur ! ô crime exécrable !
Trompé par une aveugle erreur,
J’allais, d’une main misérable,
Assassiner mon bienfaiteur !
Pardonne, ami, ce crime involontaire

CALPIGI. Ô mon héros ! que me dois-tu ? Sans force, hélas ! sans caractère, Le faible Calpigi, de tous les vents battu, Serait moins que rien sur la terre, S’il n’était pas épris de ta mâle vertu ! Ne perdons point un instant salutaire : Au sérail, la tranquillité Renaît avec l’obscurité. (Il prend un paquet dans une touffe d’arbres, et dit :) Sous cet hahit d’un noir esclave, Cachons des guerriers le plus brave. D’homme éloquent deviens in vil muet. (Il’habille en muet.) Que mon héros, surtout, jamais n’oublie Que, sous ce masque, un mot est un forfait, (Il lui met un masque noir.) Et qu’en ce lieu de jalousie Le moindre est payé de la vie. (Ils s’avancent vers l’appartement d’Astasie.) Tout est ici dans un repos parfait. (Ici Calpigi s’arrête avec effroi.) N’avançons pas ! j’aperçois la simarre, Les brodequins de l’empereur.

TARARE, égaré, criant. Atar chez elle ! Ali ! malheureux Tarare ! Rien ne retiendra ma fureur. Brama ! Lira ma !

CALPIGI, lui fermant la bouche. Renferme donc ta peine !

tarare, criant plus fort. Brama ! Brama ! (Il tombe sur le sein de Calpigi.) CALPIGI. Notre ne. ri est certaine.

SCÈNE VI ATAR sort de chez Astasie ; TARARE, CALPIGI. CALPIGI crie, effrayé. On vient : c’est le sultan. (Tarare tombe la face contre terre.) VI | ;, d’un ton terrible. Quel insolent ici… CALPIGI, troublé. t’n insolent !… c’est Calpigi. s 1 AR’. D’où vient cette voix déplorable ?

CALPIGI, troublé.

Seigneur, c’est… c’est ce misérable.
Croyant entendre quelque bruit,