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punirai de façon… Un bon arrêt, bien juste… Mais s’il allait payer la duègne… Avec quoi ?… S’il payait… Eeeeh ! n’ai-je pas le fier Antonio, dont le noble orgueil dédaigne en Figaro un inconnu pour sa nièce ? En caressant cette manie… Pourquoi non ? dans le vaste champ de l’intrigue il faut savoir tout cultiver, jusqu’à la vanité d’un sot. (Il appelle.) Anto…

(Il voit entrer Marceline, etc. Il sort.)



Scène XII

BARTHOLO, MARCELINE, BRID’OISON.
Marceline, à Brid’oison.

Monsieur, écoutez mon affaire.

Brid’oison, en robe, et bégayant un peu.

Eh bien ! pa-arlons-en verbalement.

Bartholo.

C’est une promesse de mariage.

Marceline.

Accompagnée d’un prêt d’argent.

Brid’oison.

J’en…entends, et cætera, le reste.

Marceline.

Non, monsieur, point d’et cætera.

Brid’oison.

J’en-entends : vous avez la somme ?

Marceline.

Non, monsieur ; c’est moi qui l’ai prêtée.

Brid’oison.

J’en-entends bien, vou-ous redemandez l’argent ?

Marceline.

Non, monsieur ; je demande qu’il m’épouse.

Brid’oison.

Eh ! mais j’en-entends fort bien ; et lui veu-eut-il vous épouser ?

Marceline.

Non, monsieur ; voilà tout le procès !

Brid’oison.

Croyez-vous que je ne l’en-entende pas, le procès ?

Marceline.

Non, monsieur. (À Bartholo.) Où sommes-nous ? (À Brid’oison.) Quoi ! c’est vous qui nous jugerez ?

Brid’oison.

Est-ce que j’ai a-acheté ma charge pour autre chose ?

Marceline, en soupirant.

C’est un grand abus que de les vendre !

Brid’oison.

Oui ; l’on-on ferait mieux de nous les donner pour rien. Contre qui plai-aidez-vous ?



Scène XIII

BARTHOLO, MARCELINE, BRID’OISON ; FIGARO rentre en se frottant les mains.
Marceline, montrant Figaro.

Monsieur, contre ce malhonnête homme.

Figaro, très-gaiement, à Marceline.

Je vous gêne peut-être. — Monseigneur revient dans l’instant, monsieur le conseiller.

Brid’oison.

J’ai vu ce ga-arçon-là quelque part.

Figaro.

Chez madame votre femme, à Séville, pour la servir, monsieur le conseiller.

Brid’oison.

Dan-ans quel temps ?

Figaro.

Un peu moins d’un an avant la naissance de monsieur votre fils le cadet, qui est un bien joli enfant, je m’en vante.

Brid’oison.

Oui, c’est le plus jo-oli de tous. On dit que tu-u fais ici des tiennes ?

Figaro.

Monsieur est bien bon. Ce n’est là qu’une misère.

Brid’oison.

Une promesse de mariage ! A-ah ! le pauvre benêt !

Figaro.

Monsieur…

Brid’oison.

A-t-il vu mon-on secrétaire, ce bon garçon ?

Figaro.

N’est-ce pas Double-Main, le greffier ?

Brid’oison.

Oui ; c’è-est qu’il mange à deux râteliers.

Figaro.

Manger ! je suis garant qu’il dévore. Oh ! que oui ! je l’ai vu pour l’extrait et pour le supplément d’extrait ; comme cela se pratique, au reste.

Brid’oison.

On-on doit remplir les formes.

Figaro.

Assurément, monsieur : si le fond des procès appartient aux plaideurs, on sait bien que la forme est le patrimoine des tribunaux.

Brid’oison.

Ce garçon-là n’è-est pas si niais que je l’avais cru d’abord. Eh bien ! l’ami, puisque tu en sais tant, nou-ous aurons soin de ton affaire.

Figaro.

Monsieur, je m’en rapporte à votre équité, quoique vous soyez de notre justice.

Brid’oison.

Hein ?… Oui, je suis de la-a justice. Mais si tu dois, et que tu-u ne payes pas ?

Figaro.

Alors monsieur voit bien que c’est comme si je ne devais pas.

Brid’oison.

San-ans doute. — Hé ! mais qu’est-ce donc qu’il dit ?