visage de Rousille, et, voyant des traces de larmes :
— C’est donc encore du triste, ma petite ?
— Non, mes tantes : du bonheur !
— Alors asseyons-nous, et dis promptement !
Les Michelonne s’assirent sur le coffre, et firent asseoir Rousille sur une chaise, tout près, bien en face, pour mieux juger la joie qui allait parler. Chacune s’empara d’une main de la nièce. Chacune devint attentive. Les trois visages se rapprochèrent. La chandelle éclairait assez pour qu’on pût voir le sourire des lèvres ou des yeux.
— Il y a, dit Rousille, que mon père, n’ayant plus de fils, veut faire revenir Jean Nesmy.
— Comment, Rousille, ton bon ami ?
— Tante Michelonne, c’est pour sauver la Fromentière.
— Alors, tu te maries, mignonne ? Tu te maries ? dit Adélaïde, enthousiaste, à moitié soulevée, tandis que sa sœur se courbait, au contraire, pour cacher son émotion.
— Oui, le père l’a dit : si vous voulez m’aider.
— Si je veux ! mais tu le sais bien ; tu es ma fille ; tu peux demander : que te faut-il ? mais dis donc ? de l’argent ?
— Non, ma tante…
— Un trousseau qu’on coudrait toutes deux ?
— C’est bien plus difficile, dit Rousille : il faut faire un voyage, un grand.
— Moi, un voyage ?
— Vous ou ma tante Véronique. Il faut aller jusqu’en pays de Bocage. Notre père ne peut quitter la maison. Vous iriez parler pour lui à la mère de Jean Nesmy, et la décider à se priver de son fils. Voulez-vous bien ?
Aussitôt Véronique se redressa.
— Va dans le Bocage, Adélaïde : tu es plus allante que moi !
— Est-ce une raison ? Un si grand plaisir, rendre service à Rousille, pourquoi ne l’aurais-tu pas ?
— Ma sœur, tu es l’aînée : tu remplaces la mère.
— En effet, dit simplement Adélaïde.
Elle se tut un peu de temps, tout émue de la nouvelle et de la décision. Ses joues roses avaient pâli. Elle ajouta :