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l’invocation de la mer et demeurent environnés de ses flots recéleurs de vie, de métamorphoses et d’émerveillements : le liquide élément déferle sur la première page et c’est sur une vision d’océan qu’ils se terminent. Et de la proximité des houles naît ce sentiment de vastitude et d’ensemble cosmique que de page en page, les deux recueils communiquent.

Désormais la grande force désorbitée qu’il était naguère, de plus en plus s’oriente vers de suprêmes lois. Partout il les rencontre face à face. Au sein de la Forêt le « passant fiévreux » a frémi au passage, à travers lui, de la même force qu’il perçoit en éternel voyage sous les écorces :

Mêle aux sèves innombrables dont les forêts,

Infiniment, sont traversées,

Le sang même de tes pensées…


En tel soir étoilé des campagnes de l’Escaut, où l’âme se fond en adoration — ô que loin nous voici des Soirs anciens ! — c’est « un sens nouveau du monde » qui tombe des cieux sur elles, comme une divine semence, et parmi la Foule — l’un des morceaux culminants du livre — c’est la même sensation communiale qu’il éprouve.

Je sens grandir et s’exalter en moi
Et fermenter, soudain, mon cœur multiplié.


L’isolé hagard de jadis qui cheminait chargé de son rêve douloureux et comme accablé sous le